"Il y a déjà une lutte de répartition aujourd'hui"

21 août 2019

Recycling Energie exploite à Nesselnbach AG la plus grande installation de biogaz de Suisse. Lors d'un entretien avec energate, son directeur, Werner Humbel, a notamment expliqué comment il évalue le potentiel de la biomasse en Suisse.

energate : Monsieur Humbel, l'installation de biogaz de Nesselnbach n'a cessé de croître au fil des ans et utilise aujourd'hui à elle seule environ un cinquième des déchets alimentaires en Suisse. Comment le système a-t-il évolué dernièrement ?

Humbel : Nous produisons aujourd'hui de l'électricité verte, du biogaz, de la chaleur résiduelle, du biodiesel et de l'engrais naturel, et notre taux d'utilisation global avoisine les 100 %.

energate : Y a-t-il un aspect qui pourrait être développé ?

Humbel : Nous aurions suffisamment de chaleur résiduelle pour approvisionner d'autres clients, mais nous ne trouvons pas d'acheteurs dans notre zone de chalandise. S'il y a des intéressés dans la région, nous serions donc heureux de recevoir leurs demandes. Nous voyons encore un potentiel dans le biodiesel, mais la fin prévisible de l'exonération fiscale pour cette source d'énergie nous préoccupe actuellement. Celle-ci expire fin juin 2020 et il n'existe pas encore de réglementation claire pour la remplacer.

energate : Y a-t-il une demande pour le biodiesel en Suisse ?

Humbel : La demande est là. Nous avons commencé à produire du biodiesel en 2002 et aujourd'hui, les conditions ont généralement changé : A l'époque, personne ne voulait acheter notre biodiesel. Aujourd'hui, les huiles résiduelles et les déchets nécessaires à la production sont considérés comme des matières premières et se font rares.

energate : Combien de systèmes de l'ordre de celui de Nesselnbach seraient réalisables en Suisse grâce à la biomasse indigène ?

Humbel : Il existe environ 130 installations de biogaz en Suisse, dont sept sont comparables à la nôtre. En règle générale, ces installations valorisent les déchets. La biomasse est pratiquement répartie sur tout le territoire suisse. Néanmoins, la Confédération a autorisé une soixantaine d'installations supplémentaires avec une rétribution de l'injection. Je pars du principe qu'environ la moitié d'entre elles seront mises en œuvre. La valorisation des déchets sera alors épuisée dans notre pays. Il y a déjà une lutte pour la répartition. Si d'autres grandes installations devaient s'y ajouter, l'éviction commencerait.

energate : La production nationale de biogaz en Suisse sera-t-elle suffisante pour atteindre les objectifs de 30% sur le marché de la chaleur d'ici 2030 ?

Humbel : L'un des problèmes, à mon avis, est que très peu d'installations de biogaz sont raccordées au réseau de gaz naturel. Souvent, c'est parce qu'aucun réseau de ce type n'est disponible dans les environs. La production dépend donc également des conditions, et pas seulement des matières premières disponibles. Pour notre part, nous avons eu la chance de trouver une conduite à proximité et de disposer d'une grande installation. Ainsi, l'alimentation s'est avérée rentable dès le premier jour. Mais au-delà de cela, il est vrai que des quantités vraiment importantes de biogaz en Suisse prendront toujours le chemin de l'importation. Côté production, le biogaz restera toujours une niche dans notre pays, compte tenu de la quantité totale.

energate : Quelles mesures concernant la biomasse seraient nécessaires de la part des politiques ?

Humbel : Quoi qu'il en soit, il est judicieux que la Suisse continue à ne pas introduire de denrées alimentaires dans le cycle du biogaz pour remplir d'éventuels objectifs, mais uniquement des déchets. Un autre aspect important est la fin des contributions aux investissements en 2031. Nous devons déjà réfléchir à la période suivante. Dans la politique énergétique suisse, le thème des énergies renouvelables est traité de manière très négligée, même avant ce fait. Au vu de la situation politique actuelle, nous ne produirions plus d'électricité à partir de la biomasse chez Recycling Energie AG à partir de 2031. Dans l'ensemble, nous souhaitons une politique énergétique à plus long terme, qui permette également des investissements correspondants.

Source : energate-messenger.ch, 21.08.2019

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